De la première guerre mondiale à la naissance de Chinatown dans le 13ème et de Chinagora.
Parmi sa population, la France compte aujourd’hui un grand nombre d’habitants venus d’Asie de l’Est. La plupart de ces migrants se sont installés dans la région d’Île-de-France, notamment dans le quartier du 13ème arrondissement de Paris et dans le Val-De-Marne. Les communautés chinoise et indochinoise ont été constituées par plusieurs vagues migratoires marquées par des époques très différentes forgeant ce qui est aujourd’hui le « Chinatown ».
Les premiers chinois à Paris
La première Guerre Mondiale induit une forte immigration chinoise en France. En effet, 140.000 Chinois sont recrutés par les gouvernements français et britannique pour combler un manque de main-d’œuvre la plupart dans les domaines agricoles et industriels. Un traité entre la Chine et les Occidentaux en était à l’origine.
De 1918 à 1923, à la suite du conflit et lorsqu’ils sont renvoyés dans leur pays, ils se rendent à gare de Lyon dans le but de prendre un bateau à Marseille. En arrivant à la gare, certains changent d’avis et décident de rester sur Paris et en particulier dans les petites rues contournant la gare peu fréquentée par la police et donc plus facile pour s’y installer. Ils seront embauchés des usines comme Renault ou Citroën à Billancourt ou bien commerçants dans le quartier autour de la Gare de Lyon notamment l’Ilot Chalon aujourd’hui détruit, et dans le 8eme et 9eme arrondissement. Les premiers restaurants chinois ouvrent ainsi près de la Gare de Lyon dans le 12ème arrondissement de Paris ainsi que rue Royer Collard, dans le quartier Latin. C’est la première colonie chinoise, on comptera 1000 chinois en 1930.
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La naissance du chinatown du 13ème arrondissement
L’Opération Italie 13 explique en grande partie le fameux quartier chinois que l’on connaît aujourd’hui. En effet, le Conseil de Paris approuvera le 13 janvier 1966 un secteur de 87 hectares entre la place d’Italie, l’avenue de Choisy, les rues de Tolbiac et Nationale, les boulevards des Maréchaux et une partie des quartiers de Maison-Blanche et de la Butte-aux-Cailles de part et d’autre de l’avenue d’Italie destiné à 16 400 logements et 150 000 mètres carrés de surfaces commerciales et destiné à des écoles et de petits jardins. Les constructions des tours et des commerces en béton s’en suivent.
A partir des années 1970-80, une plus grande vague d’immigration s’installe où les Chinois vont se concentrer dans les tours inhabitées du 13ème arrondissement ainsi que Belleville. Ces logements trop chers ou trop modernes pour les parisiens français ont été bradés. Le 13ème arrondissement est en plein développement industriel et historiquement un des plus pauvres de Paris, il compte en 1975 près de 163 000 habitants. Les Chinois s’installent ainsi entre la place d’Italie et la porte d’Italie. L’expatriation en banlieue des grandes entreprises et industries laisse de la place à la construction.
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Les grandes migrations indochinoises et le développement de la communauté asiatique
Dans le Val-De-Marne, Choisy-Le-Roi ne joue pas un rôle non négligeable dans l’immigration asiatique. En effet, dès 1968 la ville a accueilli la délégation de la République démocratique du Vietnam jusqu’en 1973, période de négociations des Accords de paix mettant fin à la guerre du Viêt Nam et qui seront signés le 23 janvier 1973. La délégation était venue négocier la paix avec les Américains. Et ce qui devait durer quelques semaines a duré 5 ans. Depuis le départ de la délégation, les relations sont toujours existantes et la ville est jumelée depuis 1973 avec Dong-Da. L’Association d’Amitié Franco-Vietnamienne (AAFV) est créé en 1970 afin de promouvoir la francophonie au Vietnam, mais aussi de partager la culture à travers des projections, des cafés-débats, des ventes d’objets artisanaux.
Suite à la défaite des Américains au Vietnam en 1975 et l’effondrement du régime du Sud Viêt Nam, 143 000 premiers réfugiés quittent le pays en même temps que les Américains fuyant le régime communiste, mais rapidement des réfugiés suivront le mouvement en partant par leurs propres moyens, c’est-à-dire sur des embarcations maritimes et précaires. On va les appeler les Boat-People. Parmi eux, on distingue les Chaozhou, du nom d’une ville côtière du sud-est de la Chine qui ont quitté leur pays d’origine pour se rendre en Asie du sud-est (Vietnam, Laos, Cambodge).
Dans les années 1970, ils se réfugient en France fuyant les conflits armés et obtiennent le statut de réfugiés et souvent la nationalité française. Les derniers Chaozhou arrivent en 1985-1987. Un certain nombre se rendent à Paris où ils trouvent dans le 13ème un quartier moderne à des prix intéressants et surtout inhabité sauf par la première colonie asiatique. Leur intégration en France est alors très rapide mais leurs diplômes n’étant pas reconnus, ils se tournent vers le commerce, notamment dans le triangle de Choisy formé par l’avenue de Choisy, l’avenue d’Ivry et le boulevard Masséna.
Depuis, proches et familles les ont rejoints et le quartier dit asiatique se développe sur Ivry et Choisy-Le-Roi. Les chinois ont le monopole sur quasiment tous les commerces parmi lesquels on distingue les deux grands supermarchés Tang Frères. La première boutique des Tang Frères ouvre avenue d’Ivry en 1981 et c’est en 1996 qu’ils sont considérés comme numéro 1 de l’épicerie asiatique en Europe et ont aujourd’hui un chiffre d’affaire qui dépasse les 140 millions d’euros. Ils se développent notamment à Vitry-sur-Seine dans le Val-De-Marne au boulevard Stalingrad. C’est un lieu de rencontre entre toutes les communautés de culture chinoise et indochinoise.
Les migrations touristiques
Dans le Val-De-Marne on retrouve également le Huatian Chinagora qui est un complexe hôtelier d’Alfortville construit en 1992 au confluent de la Seine et de la Marne. C’est le premier établissement hôtelier chinois installé en France. Son architecture particulière imaginée et dessinée par l’architecte chinois Liang Kunhao s’inspire de la Cité interdite de Pékin. Ainsi, on peut voir que les toits sont en saillie dans le but d’empêcher les mauvais esprits de rentrer, de même les maisons sont surélevées et les toits incurvés, ainsi les esprits se cognent et sont rejetés à l’extérieur.