Christian Hervy est aujourd’hui maire honoraire, conseiller municipal de Chevilly-Larue et président de l’association du Grand Orly qui regroupe 13 communes entre le Val-de-Marne et l’Essonne. Ces derniers temps, Christian Hervy défend un des projets qui lui tient le plus à cœur : la Cité de la Gastronomie Paris-Rungis.
Un établissement culturel dont la forme finale est encore incertaine mais qui vient de vivre une étape importante avec les différents votes favorables pour la création d’un syndicat mixte destiné à mettre la Cité de la Gastronomie sur les rails. Pour la première des interviews de Val-de-Marne Tourisme & Loisirs, nous lui avons posé quelques questions sur cette fameuse Cité.
Comment est né le projet de Cité de la Gastronomie pour le Val-de-Marne ?
La Mission Française pour le Patrimoine et les Cultures Alimentaires (MFCPA) avait lancé une consultation pour la construction d’une Cité de la Gastronomie à la suite du classement du « repas gastronomique des français » au patrimoine immatériel de l’Unesco en 2010. L’établissement Orly Rungis-Seine Amont et les élus locaux, dont je faisais partie, ont décidé de candidater avec l’idée de créer un pôle structurant en matière d’emploi et de formation mais également de développement touristique sur le MIN (Marché d’Intérêt National) de Rungis. La proposition a été retenue par la MFCPA avec trois autres propositions (Lyon, Dijon et Tours).
Comment les quatre propositions se sont transformées en un réseau de cités ?
Les villes en concurrence avaient toutes des intérêts à faire valoir et une identité à défendre. La France a la chance d’avoir des climats, des terroirs et des traditions culinaires qui sont extrêmement diversifiées et qui ont subi au fil de l’histoire des influences très différentes. Il y a matière à faire plusieurs projets de Cités de la Gastronomie en France. Pour le Ministère des Affaires Etrangères, la gastronomie est un des secteurs d’activités qui doit permettre de mobiliser des flux touristiques supplémentaires pour consolider la place de Paris comme la première destination touristique du monde. Il faut faire attention parce qu’il y a de la concurrence.
Où en est le projet ?
Le projet sera situé sur les communes de Chevilly-Larue et de Rungis. La station du métro du Grand Paris Express sera opérationnelle en 2024, c’est donc la date de livraison que nous avons choisie pour la Cité de la Gastronomie. Il était indispensable de la relier aux flux touristiques entre Paris et l’aéroport d’Orly. C’est un calendrier qui est compatible avec les Jeux Olympiques de 2024 et l’exposition universelle de 2025. Il faut maintenant concevoir l’outil qui permettra de faire travailler ensemble les collectivités territoriales, certains établissements publics et des acteurs privés. Le Conseil Départemental et les communes ont voté la création du syndicat mixte pour la réalisation de la Cité de Paris-Rungis dès le 14 décembre 2015. C’est le conseil de Paris qui terminera le mouvement à la fin du mois de février 2016.
Est-ce que le syndicat mixte va décider de la programmation scientifique et culturelle du projet ?
Il n’est pas question de remettre en cause le dossier de candidature qui a été retenu. Le syndicat mixte sera un outil de partenariat pour mettre en perspective les contenus dans une logique d’intérêt général et pas seulement de rentabilité financière, encore qu’il faille évidement un projet économiquement équilibré. Il faut vérifier que l’architecture du grand quartier de la gastronomie soit toujours viable. Celui-ci fera plus de 7 hectares et s’articulera autour de la Cité de la Gastronomie. Nous allons mettre en place un comité scientifique, culturel et pédagogique pour définir la programmation des équipements qui y sont prévus : la médiathèque, l’auditorium, le centre d’interprétation, la halle des trésors gastronomiques, la galerie de forums… Ce comité devra également définir la programmation des expositions, des spectacles et des événements alimentaires qui se produiront sur le site.
Quels seront les autres équipements de ce grand quartier ?
Nous souhaitons créer un pôle important de formation. Dans le seul secteur de la restauration, il y aurait 60 000 postes potentiels qui ne sont pas pourvus, faute de candidat. Nous essaierons également d’avoir une offre commerciale en boutique qui répondrait à la tradition d’excellence des différents secteurs de l’artisanat et de l’alimentation. Quand on se met à table, on met du linge sur la table, des accessoires pour décorer, on sert du vin, on dispose de la vaisselle, de la cristallerie, de l’argenterie… Le quartier comptera évidemment un certain nombre de restaurants. L’idée de base étant d’avoir une restauration grand public de qualité puis un certain nombre de restaurants qui monteront progressivement en gamme jusqu’à, nous l’espérons, un restaurant d’excellence avec un grand chef. Plusieurs d’entre eux, comme Michel Roth ou Alain Ducasse, se sont intéressés à notre projet et l’ont soutenu pendant la candidature. Comme il y a de l’espace, on peut aussi imaginer que des entreprises décident d’y implanter leur siège. Et quand on additionne les différents équipements de la Cité de La Gastronomie, on s’aperçoit qu’ils peuvent très bien composer un centre des congrès, ce qui permettrait de dégager de la recette toute l’année. Il faudra donc disposer d’établissements hôteliers sur le site. On peut imaginer de nombreuses directions qui devront s’harmoniser afin de faire émerger un pôle économique dynamique orienté vers le tourisme et l’économie des différents secteurs qui composent les plaisirs de la table.
Est-ce important que la Cité de la Gastronomie soit implantée dans le Val-de-Marne ?
Le Val-de-Marne n’est pas un grand département agricole, cela se saurait. Il y a néanmoins une très ancienne tradition maraîchère jusqu’au début du XXème siècle qui a ensuite reculé avec l’urbanisation. Le Conseil Départemental travaille activement, avec le soutien de l’agence régionale des espaces verts (AEV), sur la renaissance de l’activité maraichère à Périgny-sur-Yerres, à la plaine des Bordes, sur celle de Montjean à Rungis ou encore à la ferme Saint-Antoine au Plessis-Trévise. On a des surfaces suffisantes pour installer un nombre significatif de producteurs avec l’idée complémentaire de créer une filière qui permettrait d’améliorer la qualité des repas des cantines de collège. L’élément le plus identitaire sur la question de l’agro-alimentaire du Val-de-Marne, c’est bien entendu la présence du MIN de Rungis, le premier marché mondial de gros et de produits frais. Le marché de Rungis a une double réputation : celle de la qualité dans toute la filière agro-alimentaire et, dans la représentation symbolique et populaire, c’est la caverne d’Ali Baba, cet endroit secret où l’alimentation se révèle sous toutes ses couleurs, toutes ses saveurs et toutes ses odeurs. C’est un lieu qui a une intensité de vie économique et humaine considérable. La direction du marché de Rungis est en outre très impliquée dans le projet de la Cité de la Gastronomie.
Propos recueillis par Thomas Guillot le 27/11 pour Val de Marne Tourisme et Loisirs
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